Jean Claude Gandur, fondateur du groupe Addax & Oryx mais également grand collectionneur d’art et mécène, s’est vu remettre les insignes d’officier de la Légion d’honneur ce 7 octobre 2017 à l’hôtel Beau-Rivage à Lausanne, des mains de son ami Francis Wahl.
À travers la Fondation Gandur pour l’Art, il possède non seulement l’une des plus riches collections d’antiquités égyptiennes, grecques et romaines, mais également l’une des plus importantes collections mondiales d’abstraction lyrique et d’expressionnisme abstrait européen, forte de 900 tableaux, qu’il rend accessible au public à travers de nombreuses expositions : « à quoi sert d’accumuler des objets d’art si l’on est le seul spectateur de sa passion » ? Le premier contact de Gandur avec la peinture se produit lorsque son père l’amène, alors qu’il n’a que 13 ans, à une biennale dédiée par le musée d’art de Lausanne aux « nouveaux peintres » dont Mathieu faisait partie.
Jean Claude Gandur explique dans son discours de réception la formidable « opportunité [qu’il y avait] pour un collectionneur de rassembler ces héros abandonnés« , ces peintres français et étrangers de la seconde École de Paris « dont le dénominateur commun était Paris, capitale des arts, centre névralgique de la création, du bon goût et du savoir-vivre, un lieu incontournable tant le reste du monde semblait anéanti par tant de talents en un seul endroit, ces peintres que le monde entier se disputait et qui tels Icare chutèrent sous les coups de butoir de la nouvelle école américaine et dont la biennale de Venise de 1964 a sonné le glas, fatalité des cycles, les dieux de la veille devenant les damnés, oubliés par leur public, mais aussi par les musées français et étrangers« .
Cela n’est pas le fruit du hasard si Georges Mathieu est particulièrement bien représenté dans cette collection : une quinzaine de toiles dont le séminal Évanescence (1945) et le fameux L’Abduction d’Henri IV par l’archevêque Anno de Cologne (1958). Jean Claude Gandur explique qu’il passa ses années d’études universitaires au contact de Mathieu. Il rencontra à l’âge de 23 ans ce « peintre hors norme, adulé puis contesté« , qu’il « considère comme l’un des pères de l’abstraction« , et qui lui « ouvrit l’esprit à la peinture contemporaine« . Il eut avec lui « des échanges artistiques et philosophiques déterminants pour [sa] compréhension de l’art ainsi que du devenir de cette société en pleine mutation après les évènements de mai 1968« . Il raconte à ce sujet qu’un jour, il demande à Mathieu de visiter son atelier et, s’y baladant, voit un dessin froissé qui était jeté par terre. Il le déplie et demande à Mathieu ce qu’il comptait en faire. Ce dernier lui rétorqua « Il vous plaît ? Prenez-le. » Cela fut la première œuvre picturale de la collection de Jean Claude Gandur.
Crédits photo : © Fondation Gandur pour l’Art, Genève. Photographe : G.Maillot/Agence point-of-views.ch