Hommage à Adam du Petit Pont (1954)

Hommage à Adam du Petit Pont, 1954
Signée et datée en bas à droite « Mathieu 54 »
Huile sur toile
97 x 195 cm
 
En 1958, Georges Mathieu se livre à Alain Bosquet dans « 100 questions discrètes et moins discrètes », dans un entretien qui sera publié dans le n°1 de la revue Ring des Arts en 1960. Mathieu y affirme :
« Sur un fond donné et élaboré, je fais un geste qui, étant à son maximum d’efficacité, ne demande pas de lui ajouter autre chose ; je dirais même que, pour moi, les toiles où j’ai pu exprimer le maximum avec le minimum me paraissent les plus fortes et les plus importantes. »
Pour illustrer son propos, Georges Mathieu affirme que sa toile Hommage à Adam du Petit Pont, « qui n’est qu’un seul signe, forme une œuvre beaucoup plus rare et plus extraordinaire [que la Bataille de Bouvines, s’il est] arrivé à exprimer tout avec peu ».
 
Marie-Claude Dane, conservatrice du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, la commente également :
« Mathieu trouvera une confirmation de ses techniques intuitives dans l’art du Chan ou du Zen, sur le plan de la rapidité de l’exécution. (…) Un art neuf naît plus facilement d’une technique neuve ; le tachisme à l’état pur de Blanche de Turenne (1951) révèle l’essentiel et l’invisible. Plus hiératique est le subtil dépouillement d’Adam du Petit Pont et l’autonomie expressive de son unique signe blanc, tenant du relief autant que de la peinture, issu directement du tube en quelques secondes. »
 
Georges Mathieu a donné naissance à quelques rares œuvres « Zen » au fil de sa production picturale, qui si elles sont minimalistes dans leurs signes, ne le sont pas dans leur force. Les toutes premières d’entre elles, Blanche de Turenne (1951), Hommage à Godefroy de Bouillon (1952) et Hommage à Adam du Petit Pont (1954), résument en quelques signes la naissance du tachisme dont Georges Mathieu est l’instigateur. Elles nous permettent d’imaginer l’état de transe extatique que le maître pouvait atteindre après une étape parfois longue de concentration intense. Derrière le faux semblant d’une sobriété spartiate, ces peintures résultent au contraire d’une énergie singulière, libérée de façon rapide et intuitive sur une toile qui se voit percutée par « des coups de pinceaux et des taches chargées du maximum d’efficacité » jusqu’à ce que tout ajout devienne superfétatoire, nous laissant y découvrir quelque puissant idéogramme du langage de Mathieu, celui où « le signe précède le sens ». À la vue de l’Hommage à Adam du Petit Pont, on ne peut s’empêcher de penser au critique Michel Tapié qui écrivait en 1952 dans le catalogue d’exposition Le message signifiant de Georges Mathieu : « Les graphismes de Mathieu, loin de toutes les mollesses liées à l’automatisme […] ont l’air de traces issues de gestes de gigan­tesques orthoptères, traces non laissées, comme on dit, mais bien faites pour témoigner de la plus flagrante façon d’un moment de paroxysme créateur »
 
Expositions :
Galerie Rive Droite, Paris, Les Capétiens partout !, nov. 1954, no. 1 (illustré dans le catalogue).
Kunstverein, Cologne, 1959, no. 9 (illustré dans le catalogue).
Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, Paris, Mathieu, 1963, no. 45 (illustré dans le catalogue).
Galerie Albert Verbeke, Paris, Situation – De Kooning, Mathieu, Pollock, 1973, no. 4 (illustré dans le catalogue).
Galerie Nationale du Jeu de Paume, Paris, Georges Mathieu, 2002 (illustré dans le catalogue, pp. 140-141). Cette exposition a ensuite été montrée à Salle Saint-Georges, Liège ; Galleria Gruppo Credito Valtellenise, Refettorio delle Stelline, Milan.
 
Littérature :
M.-C. Dane, Mathieu, coll. Les peintres célèbres, Mazenod, Paris, 1964, p. 239.
F. Mathey, Georges Mathieu, Hachette-Fabbri, Paris-Milan, 1969, no. 73 (illustré).
D. Quignon-Fleuret, Mathieu, Flammarion, Paris, 1977, p. 45.
G. Mathieu, Mathieu, 50 ans de création, Hervas, Paris, 2003, p. 44 (illustré, p. 799).
L. Harambourg, Georges Mathieu, Ides et Calendes, 2013, p. 48.
 
 
Le 17 octobre 2018, sur le stand de la Galerie Templon à la FIAC à Paris, Daniel Templon présente l’Hommage à Adam du Petit Pont à Franck Riester, ministre de la Culture, et à Anne Hidalgo, maire de Paris.