Stand solo muséal de Georges Mathieu à Frieze Masters à Londres

Les galeries Perrotin et Nahmad Contemporary ont dédié un stand de Frieze Masters à Londres, du 3 au 6 octobre 2019, à des œuvres muséales de Georges Mathieu telles que L’écartèlement de François Ravaillac, assassin du roi de France Henri IV, le 27 mai 1610, à Paris en place de Grève (1960, à gauche sur la photo), La Bataille de Gilboa (1962, à droite sur la photo) et Hommage à Robert le Pieux (1958).

L’écartèlement de François Ravaillac, assassin du roi de France Henri IV, le 27 mai 1610, à Paris en place de Grève, œuvre historique de Mathieu, est peinte le 19 mai 1960 pour l’exposition De quelques pompes et supplices dans l’ancienne France — inaugurée à la Galerie Internationale d’Art contemporain le 24 mai 1960. Cette exposition a pour thème la Fête : « Les Pompes, qui étaient à la fois festivales et funèbres, étaient l’occasion de l’exaltation de la vie et de la mort ; la fête, paroxysme de la vie ; le supplice, paroxysme de la souffrance physique. La joie, la tristesse et la douleur morale ou physique étant les trois pôles majeurs de la sensibilité humaine de Greco à Rembrandt, de Goya à Picasso. »

John Ashbery, critique d’art et poète américain célébré (prix Pulitzer, National Book Award et National Book Critics Award), est dithyrambique dans son jugement de l’exposition, paru dans le New York Herald Tribune du 21 septembre 1960 : « Les nouvelles peintures de Georges Mathieu à la Galerie Internationale sont parmi les meilleures œuvres qu’il a faites jusqu’à présent et en font probablement le peintre abstrait le plus important en France. À partir de maintenant, il sera difficile pour ses confrères jaloux des méthodes publicitaires très efficaces de Mathieu et des hauts prix qu’atteignent ses tableaux de le rejeter en en faisant une sorte de Barnum de la peinture. Les œuvres nouvelles ont une richesse, une complétude, une vérité qu’on ne peut pas ignorer et, pour la première fois peut-être, elles ont cette sorte d’autorité évidente qu’ont les meilleures œuvres de Jackson Pollock. Elles devraient convaincre jusqu’aux plus stupides détracteurs de l’art abstrait. »

Cette œuvre majeure et monumentale préfigure de façon surprenante les évolutions qui auront lieu cinq années plus tard, au milieu des années soixante, dans la peinture de Mathieu, avec la rigueur de certaines formes, de même qu’elle préfigure les peintures des années quatre-vingt avec une véhémence inédite.

Le regard se fixe d’emblée sur cette ligne de couleur verte, une couleur très rarement utilisée par Mathieu car elle évoque à première vue la nature qui n’a pas sa place dans la peinture abstraite. Mais sa signification est toute autre ici. Mathieu cite dans l’un de ses livres Vincent Van Gogh « qui disait que le vert et le rouge sont les sym­boles des passions humaines », or ce sont là les deux couleurs chromatiques de cette toile. On comprend dès lors la charge émotionnelle de cet éclair vert qui balafre la toile en son centre, son évocation d’une vive douleur. La critique d’art Nicole Duault s’attarde sur cet élément central : « Cette ligne verte qui zigzague sur une composition rougeoyante, pleine de griffures blanchâtres, est d’une intensité impitoyable. Un choc. Une brisure. »

L’Écartèlement de François Ravaillac nous offre le privilège rare d’être au plus proche contact d’un « Mathieu violent, indigné, ému par le sang versé » comme le souligne le critique d’art Jean-Louis Ferrier. Patrick Grainville, de l’Académie Française, écrit : « L’Écartèlement de Ravaillac appelle le dripping jusqu’à la saturation, l’inondation sanglante. »

L’œuvre est présente lors des plus importantes expositions :
• la rétrospective au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris en 1963, une telle rétrospective du vivant d’un artiste, de plus encore jeune, était alors du jamais vu,
• l’exposition Palais des Papes en 1985,
• l’exposition au Château de Versailles en 2006, précédant de quelques années la venue de Koons, Murakami, Venet, Ufan, Kapoor et Eliasson,
• mais également l’exposition Affirmations du Musée des Beaux Arts de Liège en juin 1961, l’exposition Les Mathieu de Mathieu, Trente ans d’Abstraction Lyrique au Casino-Kursaal à Ostende en juillet-août 1977, l’exposition personnelle à la galerie Sapone à Nice de juillet à septembre 1987, l’exposition personnelle à l’Abbaye des Cordeliers à Châteauroux en 1990, l’exposition L’Ecole de Paris ? 1945-1964 au Musée national d’histoire et d’art à Luxembourg en 1998, l’exposition personnelle dans l’Espace d’Art Contemporain Fernet Branca à Saint-Louis de décembre 2006 à février 2007.

Elle est reproduite, entre autres, dans la monographie de Dominique Quignon-Fleuret de 1977, dans celle de Patrick Grainville et Gérard Xuriguera de 1993, dans l’ouvrage « 50 ans de création » conçu par Mathieu en 2003.